GT Advanced Technologies aurait-elle été piégée par Apple ? C’est ni plus ni moins ce qu’affirme Daniel Squiller, le directeur de l’exploitation du fabricant, dans la déclaration qu’il a effectuée sous serment le 28 octobre dernier et dont les minutes non éditées ont été publiées aujourd’hui.
Selon Squiller, Apple aurait attiré GTAT avec une offre aussi « alléchante » que « déséquilibrée ». Pour les besoins de son « projet Onyx » de fabrication de saphir synthétique, la firme de Cupertino a proposé d’acheter 2 600 fours, qu’elle aurait placés sous la responsabilité de GTAT dans une nouvelle usine ultra-sécurisée à Mesa (Arizona).
Face à ce qui aurait été le plus gros contrat de son histoire, GTAT a coupé les ponts avec les concurrents d’Apple pour se concentrer sur cette offre. Après « de longs mois de négociations acharnées », la firme de Cupertino a perdu patience : « venez jouer dans la cour des grands et signez ce contrat », aurait-elle déclaré, assurant qu’elle ne négociait pas avec ses fournisseurs.
Négocier, c’est pourtant ce qu’elle a fait, en changeant les termes de son offre. Apple n’est en effet pas propriétaire des fours de l’usine de Mesa : la mouture définitive du contrat « reporte tous les risques financiers sur GTAT » en l’obligeant à emprunter 578 millions de dollars pour acheter 2 036 fours. Un prêt contracté auprès de la firme de Cupertino…
…sans qu’elle soit dans le même temps contrainte à acheter le saphir produit avec cet équipement. Pourquoi ce revirement ? À trop se concentrer sur ce contrat, GTAT en a négligé ses autres activités, au point de mettre en péril ses finances. Le fournisseur n’avait d’autre choix que de se soumettre aux exigences d’Apple — ou de se déclarer en faillite et d’obtenir de la justice qu’elle casse ce contrat.
Qui dit action en justice dit révélation d’informations confidentielles, ce dont Apple se serait bien passé. Le juge en charge du dossier a cependant estimé que la plupart des documents soumis par GTAT pouvaient être publiés, ce qui explique que la déclaration de Squiller soit aujourd’hui disponible.
Une déclaration qui fait bondir John M. Sullivan, l’un des avocats d’Apple : passant outre qu’elle a été réalisée sous serment, il assure qu’elle contient « de nombreuses déclarations fausses, diffamatoires et hors de propos. » « Elle décrit les intentions d’Apple, ses stratégies de négociations et ses pratiques commerciales de manière déplacée » et « quelques bons mots », affirme-t-il.