L’investissement d’Apple d’un milliard de dollars dans le groupe de transport Didi Chuxing a surpris quelques observateurs qui ne s’attendaient pas à ce que le constructeur de Cupertino s’intéresse au marché du covoiturage et du VTC chinois. Et il est probable que cette transaction ait aussi étonné à Cupertino par sa rapidité : il n’a fallu en effet que 22 jours entre les premières tractations et la signature du deal. On a connu Apple autrement plus prudente, surtout au vu du montant engagé.
Bloomberg lève un coin du voile sur cette affaire qui a commencé… comme une blague. La présidente de Didi, Jean Liu, a rencontré Tim Cook le 20 avril à Cupertino. N’importe quelle entreprise qui porte le nom d’un fruit « peut réaliser quelque chose de grand », a-t-elle alors dit lors de la réunion — la dénomination juridique de l’entreprise, Xiaoju Kuaizhi, signifie en effet… « petite orange ». Quoi de plus normal que de s’entendre avec une pomme !
Liu ne s’était pas rendue à Cupertino pour parler investissement ; elle souhaitait d’abord s’entretenir avec Tim Cook sur des sujets plus généraux comme le marché chinois et sur des opportunités de coopération entre les deux sociétés. « L’accord s’est réalisé à une vitesse éclair », dit-elle, « nous avons été très impressionnés par Tim. C’est un leader incroyable ». On ne lui connaissait pas non plus cette célérité dans le maniement du carnet de chèques.
Après cette rencontre, les équipes d’Apple et de Didi ont pris le relais pour organiser les choses. Elles ont montré « de grands talents dans l’exécution, elles ont été très professionnelles », s’est réjoui Liu qui est, par ailleurs, la fille du fondateur de Lenovo.
Ce milliard de dollars va permettre à Didi de poursuivre son extension en Chine, recruter de nouveaux chauffeurs, et faire connaitre ses prestations auprès des consommateurs (le service est présent dans 400 villes et assure 11 millions de voyages chaque jour). La somme d’Apple fait partie d’un nouveau tour de table de 3 milliards, qui valorise Didi à hauteur de 26 milliards. Avoir Apple dans son tour de table est aussi un atout auprès d’autres investisseurs qui auraient pu préférer donner de l’argent à Uber, le grand rival. Travis Kalanick, le patron du spécialiste américain du VTC, va d’ailleurs rencontrer Apple cette fin de semaine… La concurrence est féroce entre les deux sociétés sur le marché chinois.
Apple met ici un pied dans un secteur qui lui était jusqu’à présent inconnu. La Pomme gagne, au prix fort certes, des alliés sur un marché chinois très important pour les ventes de ses produits. Didi compte en effet comme actionnaires Alibaba et Tencent, qui pourront se montrer d’une aide précieuse pour déployer plus largement Apple Pay et d’autres services. Sans oublier l’expérience dans les transports acquise auprès de Didi, ce qui ne sera pas une mauvaise chose si Apple devait un jour décider de se lancer dans la construction automobile.