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Jeff Williams aux 30 ans de TSMC : ne gâchons pas la prochaine décennie

Florian Innocente

Tuesday 24 October 2017 à 14:45 • 29

AAPL

Pour les 30 ans de TSMC, Jeff Williams, le numéro 2 d'Apple, a parlé intelligence artificielle et raconté la manière dont il a noué un partenariat avec cet indispensable fondeur taïwanais.

Pour les 30 ans de TSMC (Taiwan Semiconductor Manufacturing Company), son fondateur le Dr Morris Chang (qui en abandonnera la direction en juin 2018) avait invité plusieurs de ses principaux clients à venir tailler le bout de gras. Jeff Williams était notamment entouré de Steve Mollenkopf le patron de Qualcomm, Simon Segars celui d'ARM ou encore de Jensen Huang de Nvidia.

TSMC s'occupe de la fabrication des processeurs Ax développés par Apple sur la base des plans d'ARM. Jeff Williams fait remonter à 2010 la naissance de cette relation entre Apple et TSMC.

Le pari d'Apple sur TSMC

C'est à l'occasion d'un déjeuner chez Morris Chang que l'idée d'une collaboration a émergé « Nous savions qu'il y aurait de formidables possibilités si nous pouvions utiliser des techniques de pointe et les marier à nos ambitions. Et ce qui peut sembler évident aujourd'hui ne l'était pas alors, les risques étaient assez importants ».

Ancien d'IBM, Jeff Williams a repris en 2010 le poste précédemment occupé par Tim Cook à la direction des opérations, la logistique et les relations avec les fournisseurs. Il est aux premières loges dès lors qu'il s'agit de préparer la fabrication d'un futur produit.

Notre façon de travailler consiste à consacrer toute notre énergie à de nouveaux produits puis à les lancer, et si nous devions miser sur TSMC, il n'y aurait pas de plan B. Avec les volumes qui sont les nôtres, on ne peut pas planifier en double ». En résumé, ça passe ou ça casse : « Nous voulons les meilleures technologies mais nous les voulons dans des volumes qui impliquent qu'elles soient prêtes ». Juste avant lui, le Dr. Chang avait qualifié la nature de cette relation avec Apple « d'intense ».

Le pari sur TSMC était d'une formidable ampleur, poursuit Jeff Williams.

TSMC a investi 9 milliards de dollars, il avait 6 000 personnes qui ont travaillé sans relâche pour sortir de terre une usine de fabrication à Taiwan en un temps record de 11 mois. Et au final, ça s'est fait sans une anicroche.

500 millions de processeurs environ ont été produits à l'issue de ce partenariat. TSMC a dépensé au total quelques 25 milliards de dollars, mais Williams insiste sur le fait que peu d'entreprises dans le monde sont capables d'investir 9 milliards sur un seul projet aux allures de pari, comme ce fut le cas.

Du bon usage des processeurs

Plus loin dans la discussion, Jeff Williams aborde le sujet de l'évolution des processeurs pour mobiles et pose la question de leur utilisation : « Il est intéressant de voir qu'il y a dix ans, la question qui se posait était : "Est-ce que la puissance dans nos processeurs est à la mesure de nos ambitions" ». L'époque était celle d'un compromis inévitable entre performances et consommation énergétique « et le sentiment qui prévalait était qu'il fallait choisir — c'était soit l'un, soit l'autre ».

Aujourd'hui la donne a changé, grâce notamment à ARM qui conçoit des design de puces, puis à ses clients qui les adaptent à leurs besoins et enfin à TSMC qui les fabrique. Une nouvelle répartition des tâches et des spécialités qui a conduit au point où « ces compromis ne sont plus nécessaires. » — en somme on a le beurre et l'argent du beurre… — « C'est un nouveau monde qui s'ouvre à nous pour la prochaine décennie ».

Par conséquent, même s'il convient de ne pas relâcher l'effort dans les procédés de fabrication, c'est une nouvelle question qui se pose à tous : « Au vu de cette technologie qui s'offre à nous, est-ce que nos ambitions sont les bonnes ? »

Apple, poursuit Williams, croit fermement dans l'importance d'une puissance de calcul utilisée en local et pas uniquement déportée dans le nuage :

Nous pensons que c'est le meilleur moyen pour proposer de formidables fonctions sans sacrifier leur réactivité et la confidentialité des données et la sécurité. Nous le constatons avec notre tout nouveau processeur A11 Bionic, qui est fabriqué ici chez TSMC, chaque fois que quelqu'un prend une photo, ce sont 100 milliards d'opérations. C'est ahurissant. Pour une seule image, plus de 100 milliards d'opérations. Le potentiel n'a aucune limite.

Il mentionne ensuite l'ajout d'un moteur neuronal dans l'A11 pour Face ID et que celui-ci fonctionne en local sur le téléphone, il y a aussi l'ambition d'améliorer les capacités de fonctionnement autonome de toutes sortes de systèmes par l'utilisation de l'intelligence artificielle et les apports possibles dans la santé. Un domaine qu'Apple suit de près.

Jeff Williams porte aussi la casquette de responsable du développement de l'Apple Watch et de ResearchKit pour le milieu médical. Il estime que ces différentes capacités de calcul en local sur les smartphones, mais aussi dans le nuage, puis les applications possibles en apprentissage automatique, apprentissage profond et, enfin, en intelligence artificielle, peuvent bouleverser la manière dont les soins sont prodigués « et de notre point de vue, il n'y a rien de plus important », martèle le lieutenant de Tim Cook.

La génération actuelle se trouve à la croisée des chemins, insiste Jeff Williams, et la manière dont elle va exploiter cette puissance de calcul va être déterminante :

L'innovation ne se fait pas toute seule, c'est l'homme qui l'impulse. Il nous incombe, à cette génération, dans les dix prochaines années, de tirer avantage de ce qui s'offre à nous en matière de processeurs. Chez Apple c'est quelque chose qui nous inspire, pour ceux d'entre nous qui ont commencé sur des écrans monochromes, nous trouvons une inspiration très forte dans la situation actuelle.

Je dirais ceci : si dans les dix prochaines années, du point de vue de la société, nous réalisons seulement quelques trucs tape-à-l'œil, comme ce rêve de faire voler les voitures et, que le reste du temps, grâce à des processeurs plus véloces, nous nous contentons de faire plus vite ce que nous faisons déjà aujourd'hui, alors nous aurons gâché l'une des plus belles opportunités qui se présentent à nous.

Je pense, comme, mes confrères, que nous sommes arrivés à un tournant, où avec la puissance de calcul en local, couplée aux possibilités de l'intelligence artificielle, nous pouvons vraiment, véritablement, changer le monde. Et rien ne nous emballe plus que cela chez Apple.

Plus loin dans la conférence, Jeff Williams réitère ce qui à ses yeux est le plus important lorsqu'on parle d'intelligence artificielle. C'est moins le risque de voir une IA supplanter l'intelligence humaine que celui d'un détournement des vastes volumes de nos données personnelles stockés dans les bases de données. D'où l'importance, insiste-t-il, de savoir les traiter en local, à même nos appareils.

Il avait cité Face ID comme exemple mais on pourrait ajouter l'album Personnes dans Photos, où les visages sont identifiés par des traitements locaux sur l'iPhone et non pas au travers d'une puissance de calcul déportée dans le nuage, comme le fait Google.

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