Chrome 89 intègre les premières pièces de la nouvelle machine de personnalisation des publicités de Google, FloC, qui regroupe les utilisateurs en « cohortes » aux intérêts similaires. Avec FloC, Google ambitionne d’abandonner les cookies sans renier la publicité ciblée, son activité première. Voilà qui pose un problème aux développeurs des navigateurs Vivaldi et Brave, qui font grand cas de la confidentialité, mais utilisent le moteur de rendu Chromium… conçu par Google.
« Nous défendons le droit de nos utilisateurs à la confidentialité » déclare Jon von Tetzchner, CEO de Vivaldi, « nous n’approuvons ni le pistage ni le profilage, même déguisé ». « Brave s’oppose à FloC », ajoute Brendan Eich, CEO de Brave, « et toute autre fonction conçue pour partager vos informations personnelles et vos intérêts sans votre consentement pleinement éclairé ». Les deux entreprises travaillent à désactiver FloC dans le moteur de rendu Chromium.
Depuis quelques jours, Google éprouve le système de formation de cohortes auprès d’une petite partie des utilisateurs de la dernière version de Chrome dans une dizaine de pays. L’association de protection des libertés sur le web EFF propose un site web pour vérifier la présence du FLoC ID, un identifiant vous assignant dans une cohorte, dans votre navigateur. Cet identifiant résulte de l’analyse de votre historique de navigation dans la dernière semaine.
Une cohorte rassemble « quelques milliers » d’utilisateurs, explique Google, dont l’étude porte actuellement sur 33 000 groupes. Les sites web peuvent demander l’identifiant FLoC pour personnaliser leurs publicités, selon que tel utilisateur fasse partie de la cohorte des amateurs de technologies qui tricotent ou de la cohorte des amateurs de voitures qui vapotent, par exemple. Google assure prévenir la formation de cohorte autour de sujets « sensibles », qu’ils soient sanitaires ou politiques, sans détailler les critères retenus.
Sans être aussi précises que les profils enregistrés dans les cookies et le stockage local, qui permettent d’identifier un utilisateur donné, ces cohortes ne sont rien d’autre qu’une empreinte numérique, qui assurent le ciblage de profils très spécifiques. C’est tout l’enjeu : Google veut précéder la disparition annoncée des cookies, notamment sous la pression d’Apple, mais préserver son modèle économique, qui repose presque entièrement sur la publicité personnalisée.
« FLoC partage des informations sur vos habitudes de navigation avec des sites et des annonceurs qui n’auraient autrement pas accès à ces informations », dénonce Brave, qui est pourtant coutumière des scandales liés au détournement de la navigation. « Enlevons les gants », dit Vivaldi, « FLoC est une technologie de pistage intrusive. » Reste à savoir si la désactivation de FloC dans ces navigateurs sera pérenne, ou s’il deviendra intrinsèque au moteur Chromium.