Depuis plusieurs mois Google s’est engagé dans un durcissement contre les bloqueurs de pub sur YouTube : la plateforme empêche de plus en plus la lecture des vidéos quand un adblocker est détecté. Le géant du web va pouvoir compter l’année prochaine sur une nouvelle mesure pour contrecarrer encore plus efficacement les bloqueurs : le ralentissement des mises à jours des extensions.
Il faut savoir que la plupart des bloqueurs de pub s’appuient sur des listes qui recensent tous les éléments à filtrer. Ces listes souvent maintenues par des communautés sont au cœur du jeu du chat et de la souris : dès qu’un éditeur change une URL ou un autre élément pour éviter de voir la pub disparaître sur son site, un volontaire modifie la liste, qui est ensuite distribuée rapidement auprès des utilisateurs. La fréquence de rafraîchissement de la liste dépend des extensions, mais elle ne dépasse pas une poignée de jours généralement.
Si les bloqueurs sont moins efficaces sur YouTube depuis quelque temps, c’est parce que Google modifie beaucoup plus fréquemment sa façon de distribuer les pubs. Pour suivre, « les listes de filtrage doivent être mises à jour quotidiennement au minimum », explique Krzysztof Modras, l’un des responsables de l’extension Ghostery, à Engadget. Sauf que cela risque de devenir impossible sur Chrome à l’avenir.
Pour éviter que les bloqueurs ne réagissent trop rapidement à ses contremesures, Google a en effet eu l’idée de ralentir leur fréquence de récupération des listes. Dans le cadre du Manifest V3, un nouvel ensemble de règles qui va régir les extensions, les listes ne pourront plus être mises à jour indépendamment des extensions.
D’après Krzysztof Modras, les bloqueurs de pub devront repasser par tout le cycle de validation du Chrome Web Store rien que pour incorporer une nouvelle liste, ce qui est beaucoup plus contraignant et lent que le fonctionnement actuel. La validation d’une extension par Google peut prendre de quelques heures à quelques semaines aujourd’hui et cette étape risque d’être encore plus longue quand tous les bloqueurs feront la queue pour une simple actualisation de liste.
Au bout du compte, les bloqueurs de pub seront donc moins réactifs et a fortiori moins efficaces. Google ne présente pas la situation comme ça, il préfère parler de l’hypothétique bénéfice en matière de sécurité pour les utilisateurs, mais c’est bien l’effet qu’aura la nouvelle politique de validation. « À travers le Manifest V3, Google fermera la porte à l’innovation dans le domaine du blocage de publicités et ajoutera une couche supplémentaire de contrôle qui ralentira les bloqueurs », résume le cadre de Ghostery.
Après plusieurs reports, le Manifest V3 est censé devenir obligatoire pour toutes les extensions sur Chrome à partir de juin 2024. Compte tenu de la popularité des extensions Chrome et de leur base commune avec les siennes, Firefox est contraint de prendre en charge le Manifest V3, mais le navigateur libre va garder une compatibilité avec le Manifest V2 moins restrictif pour les bloqueurs. Quant à Safari, la version actuelle (17) gère aussi bien le Manifest V2 que V3. Apple n’a pas précisé si (et quand) elle allait mettre un terme à la prise en charge de la V2.