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MobileMe : les dessous d'un lancement raté

Florian Innocente

Friday 01 August 2008 à 07:30 • 57

AAPL

Entre les démonstrations d'un produit et la réalité il y a souvent quelques écarts, mais cela fait en quelque sorte partie du jeu. Le feuilleton estival de MobileMe en aura par contre donné une toute nouvelle illustration. Et les choses se font encore plus intéressantes lorsqu'on apprend que ces problèmes avaient été anticipés…

Coûteux lancement

En juin dernier, on se souvient avec quelle aisance et fluidité Phil Schiller, le Senior Vice President Worldwide Product Marketing d'Apple, faisait étal des nouveautés du remplaçant de .Mac et ce, quelques semaines seulement avant son ouverture au public. Sur la forme tout semblait parfait, alors que dans la coulisse l'édifice était en réalité brinquebalant. On connait la suite.

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A deux reprises déjà Apple s'est confondue en excuses auprès de ses clients en leur offrant, pour faire bonne mesure, un mois gratuit à chaque fois. Ne serait que financièrement, ces petits gestes ont dû couter cher (on estime à 2 millions le nombre total d'utilisateurs de .Mac/MobileMe). Sans parler de la mauvaise publicité faite à ce service qui se voyait promu comme clef de voute pour des communications entre des Mac, des PC et l'iPhone.

Steve Jobs lui-même a eu un coup de sang puisqu'il a intimé l'ordre de mieux renseigner les clients sur la progression des opérations de rétablissement. Un signe peut-être aussi d'un état de désorganisation dans l'équipe en charge de ce service.

Car du simple accès au service en passant par son utilisation jusqu'à un bug dans la facturation des abonnements, les problèmes de MobileMe ont couvert un bel éventail. Apple n'est pourtant pas une novice lorsqu'il s'agit de manoeuvrer de gros navires sur Internet. Les Apple Store à travers le monde et surtout l'iTunes Store en sont d'excellentes preuves.

Des risques connus

D'après certaines sources, familière des opérations Internet d'Apple, les causes de ce semi-naufrage sont sans surprises : MobileMe a été lancé alors que les applications étaient toujours en phase de bêta.

Le démarrage de MobileMe a véritablement commencé la veille de son ouverture officielle le vendredi 11 juillet. Et si, en prévision, les serveurs supportant .Mac avaient été stoppés le mercredi en début de soirée, ce n'est que le dimanche suivant, dans la journée, que le système a véritablement commencé à être stabilisé.

Pour couronner le tout, cette cascade de problèmes n'a fait que confirmer, grandeur nature, de précédents tests de montée en charge ou de simple utilisation qui avaient justement révélé la nature et l'origine des ennuis à venir. Mais apparemment l'équipe en charge de .Mac/MobileMe a décidé de passer outre ces avertissements.

Comme un air de Microsoft

MobileMe que ce soit pour son logo aux allures de Windows Me ou pour ses dysfonctionnements, a rapidement été associé à un produit de type Microsoft. Cruelle coïncidence ! Pour l'anecdote, c'est justement une équipe formé d'anciens de Microsoft qui tenait les rênes de .Mac depuis maintenant deux ans. Une période durant laquelle le projet MobileMe a été initié (il y a environ dix-huit mois) et supervisé.

Les soucis rencontrés par MobileMe sont un complexe mélange de logique distribuée dans le navigateur client qui doit se synchroniser avec les serveurs, de problèmes d'architecture et de montée en charge des serveurs.

Panic Room

Au moins deux solutions ont été mises en place en urgence pour pallier temporairement ces problèmes. Matérielle tout d'abord par un renforcement significatif de l'infrastructure. De ce que nous avons appris, un nombre tout à fait impressionnant de Xserve a été installé en catastrophe juste après l'ouverture de MobileMe.

Solutions logicielles ensuite par la désactivation de quelques fonctions plus ou moins visibles, mais dont la soustraction a permis aux serveurs de souffler un peu. L'intégration du carnet d'adresses avec le webmail, des options d'affichage ou encore le partage de fichiers ont ainsi disparu et ne sont revenus que plus tard et encore, pas toutes.

Une technologie trop verte

Le choix de SproutCore (une extension à JavaScript qui autorise les effets d'interface de MobileMe) pour le coté client semble avoir été prématuré. Ce framework n'est d'ailleurs toujours pas arrivé au stade d'une version 1.0 stable (il est en 0.9.x). Et malgré tout, voilà que MobileMe, du jour au lendemain, se trouve poussé vers les navigateurs de deux millions d'utilisateurs, transformés pour l'occasion en bêta-testeurs. Avec en plus, côté Windows, un entredeux désagréable : un support partiel de l'actuel Internet Explorer 7 et pas de support du tout de sa version 6.

mobilemelogin


On remarquera aussi que la page d'accueil de MobileMe, qui a pour unique objet de recevoir l'identifiant et le mot de passe de l'utilisateur, pèse pas loin de 850 Ko contre 550 Ko, par exemple, pour la page d'accueil d'Apple.com.

L'interface du webmail ce sont 2.6 Mo de données à expédier vers l'utilisateur contre 1.9 Mo par exemple pour celui de Yahoo qui est pourtant plus proche de l'interface et des fonctionnalités de MobileMe que de l'austérité d'un Gmail (1.9 Mo aussi).

Pour le calendrier on charge l'équivalent de 2.2 Mo de données (120 Ko pour l'agenda de Yahoo, certes bien moins sophistiqué et moins élégant dans son interface).

Autant de lourdeurs qui n'expliquent pas tout, loin s'en faut, mais qui prennent leur part dans les difficultés rencontrées.

Lent retour à la normale

Aujourd'hui MobileMe est revenu à de meilleures dispositions, mais des bugs subsistent çà et là. Ainsi l'auto remplissage d'une adresse lors de la création d'un courrier fonctionne… à condition de s'y reprendre à deux fois pour rédiger sa missive (créez un mail, fermez-le puis récréez-le).

La saisie de jours négatifs dans l'option de répétition d'un évènement laisse le calendrier de marbre, tout comme l'entrée d'une heure de type "23:00 AM", curieux mélange de formats européen et américain.

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Ces bugs sont toutefois peu à peu discrètement corrigés. En début de semaine par exemple, l'export de contacts au format vCard ne fonctionnait pas et l'édition de fiches de contacts présentait différents problèmes. Là encore, ces erreurs n'empêchent pas le fonctionnement global de MobileMe mais elles témoignent de son manque de finition.

Le petit nuage du logo de MobileMe était supposé symboliser cet espace numérique (le "digital cloud") et intangible qu'est Internet et où circulent et sont hébergées sereinement nos données. En attendant d'en arriver là, il traduit parfaitement la météo du successeur de .Mac : "ciel nuageux avec quelques éclaircies".

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