Avec ses produits « Éveil Lumière », « EnergyLight » ou « Ambilight », Philips innove depuis des années pour vous donner envie d’acheter… des ampoules. Ses ampoules Hue surfent sur la tendance consistant à rendre les objets du quotidien plus « intelligents » en les connectant au réseau. Mais est-ce véritablement utile ? La réponse dans notre test.
De belles et chères ampoules
Les ampoules Hue ne sont pas vraiment des ampoules « intelligentes » : prises séparément, elles ne sont rien de plus que des ampoules à DEL. Elles peuvent néanmoins se connecter sans-fil à un pont, lui-même relié au réseau : on peut alors les contrôler à distance avec une application iOS.
Pour commencer à utiliser Hue, il faut acheter un « kit de départ » qui comporte le pont (fourni avec un adaptateur secteur et un câble Ethernet) et trois ampoules et coûte la bagatelle de 199,95 €. Chaque ampoule supplémentaire vaut 59,95 €. Le kit comme les ampoules ne se trouvent pour le moment que dans les Apple Store (quand on les y trouve) et sur l’Apple Store en ligne (avec 4 à 6 semaines de délai).
Une ampoule Hue (à gauche) par rapport à une ampoule flamme traditionnelle.
L’investissement de départ est important, sans doute même dissuasif, surtout avec une disponibilité aussi aléatoire. Un kit de départ à 75 € avec le pont et une ampoule abaisserait le prix d’entrée, le système invitant de toute manière à l’achat d’ampoules supplémentaires pour relier tout l’éclairage domestique au pont.
Les ampoules elles-mêmes sont assez chères : à l’unité, elles valent au moins deux fois plus cher que les autres ampoules DEL Philips émettant 600 lumens (l’équivalent d’une ampoule à filament 50 W) et certifiées pour 15 000 heures d’utilisation (soit 5 à 7 ans selon vos usages). C’est le prix pour l’équipement qu’elles intègrent, des différentes couleurs des diodes à la puce sans-fil intégrée.
Le pont.
Le système Hue ne se repose par sur un réseau Wi-Fi, mais un réseau ZigBee, une norme (IEEE 802.15.4) plutôt adaptée aux usages domestiques. Le schéma est le suivant : votre appareil iOS est connecté à votre routeur en Wi-Fi, le pont est relié au routeur en Ethernet, et peut communiquer avec les ampoules en ZigBee. La plupart du temps, le pont n’émet pas. Il n’émet que lorsque vous utilisez l’application iOS, le routeur provoquant alors son réveil en moins d’une demi-seconde.
Le pont consomme donc peu (nous l’avons mesuré à 3 W au maximum) et n’émet pas d’ondes radio en continu. Les ampoules elles-mêmes, comme la plupart des bonnes ampoules DEL, sont tout aussi économes : elles consomment 8,5 W. Sur la première semaine du test, la consommation électrique moyenne dédiée à l’éclairage de mon appartement a baissé de près de 75 %, alors que les ampoules étaient plus sollicitées qu’à l’habitude.
Une installation simple
Un bon point donc, mais vous ne pourrez pas forcément utiliser les ampoules Hue : elles sont dotées d’un culot à vis E27, un standard aux États-Unis, un peu moins en Europe. Vous avez peut-être encore des culots à baïonnette chez vous (B22 notamment), et 80 % des éclairages de notre rédaction utilisent des culots à vis E14. Si votre installation est « compatible », l’installation sera très simple.
Le pont fourni dans le kit de départ est pré-configuré pour fonctionner avec les trois ampoules fournies. Pour contrôler l’ensemble, vous utiliserez l’application Philips Hue pour iOS ou pour Android : au premier démarrage, elle vous demandera d’appuyer sur l’unique bouton du pont pour l’appairer. On peut difficilement faire plus simple.
Un pont peut contrôler jusqu’à cinquante ampoules. Chaque ampoule est numérotée, mais on peut heureusement leur attribuer un nom, par exemple celui de leur emplacement. Philips a le sens du détail : lorsque vous changez le nom d’une ampoule, celle-ci clignote pour que vous puissiez la repérer facilement.
Il est assez difficile de faire fonctionner les ampoules du kit de départ avec un autre pont que celui qui les accompagnait : en cas de panne du pont donc, il faudra racheter un kit de départ. De même, utiliser un deuxième pont requiert des manipulations assez alambiquées : le système Hue n’est pas encore adapté aux très grandes installations.
Dans la plupart des cas, le pont sera relié au même routeur qui sert du Wi-Fi aux appareils de contrôle. Si vous utilisez plusieurs réseaux ou que vous voulez contrôler vos lampes depuis l’extérieur, il faut relier votre pont à un compte Philips Hue. En vacances par exemple, vous pourrez alors allumer une sorte de veilleuse pour simuler votre présence.
Une télécommande agréable
L’application Philips Hue pour iOS ou Android est assez agréable à utiliser. Elle est organisée autour de « scènes », des photographies dont les couleurs sont utilisées par les différentes lampes. La plupart des ambiances ainsi définies sont monochromes : la scène « Grèce » offre une palette de tons orangés alors que la scène « Ski » est plus bleutée. D’autres jouent au contraire sur les contrastes : la scène « fond marin » est bleue et rouge, la scène « Kathy » orange, rose et bleue.
Toutes ces scènes ne sont pas des réussites, mais vous pouvez les modifier ou les dupliquer pour effectuer d’autres choix. Vous pouvez aussi ajouter vos propres photos et placer vos ampoules sur différentes couleurs. Philips est visiblement très fière de cette possibilité et ne cesse de la promouvoir : il paraîtrait que créer ces ambiances colorées vous permettrait de retrouver les sentiments du contexte de la photo (vacances, famille…).
Philips fournit aussi des ambiances plus spécialisées, des « Light Recipes » qui rappelle les produits de luminothérapie de la société. Ce sont en fait des variations de blanc plus ou moins chaudes (de 2 000 à 6 500 K), du très chaud « détente » au bleuté « énergie » en passant le blanc lumineux, mais pas agressif de « lecture ». À vrai dire, ce sont les ambiances que nous avons le plus souvent utilisées pendant nos semaines de test : toutes les ampoules sont alors exactement de la même couleur, dans des tons neutres.
La luminosité de ces ambiances et des scènes peut être réglée à la volée, l’application faisant ainsi office de variateur. Les variations d’intensité peuvent d’ailleurs être enregistrées comme scène : la chaleur du mode « détente » au réglage minimum d’intensité fait par exemple une très bonne veilleuse pour les soirées TV.
On peut aussi s’éloigner de ces scènes pour régler l’intensité lumineuse (en orientation portrait) et la couleur (en orientation paysage) de chaque lampe. L’interface est plutôt bien conçue : une partie est dédiée à des variations de blancs, l’autre à une palette de couleurs. Le variateur est néanmoins très difficile à utiliser en mode paysage, dommage.
Enfin, chaque ambiance ou scène enregistrée peut être programmée. Les ampoules Hue peuvent ainsi remplacer un système « Éveil Lumière » si on les utilise comme réveil. Dans une chambre d’enfant, on peut au contraire les utiliser comme veilleuses qui s’éteindront à une heure déterminée. L’allumage et l’extinction peuvent être instantanés ou s’étendre sur 3 ou 9 minutes, des paliers malheureusement trop courts.
Autre limitation de cette bonne idée de départ, on ne peut pas programmer un réveil différent selon le jour, ou au moins selon que l’on soit en semaine ou le week-end. Enfin, toutes les ampoules de la scène choisie s’allument ou s’éteignent avec ce programmateur : il vaudra donc mieux créer une ambiance spécifique avec uniquement les ampoules de la chambre par exemple.
Des lampes bidouillables
L’application de Philips a vocation à être la solution de contrôle par défaut, pour la majorité des utilisateurs. Mais le système Hue est étonnamment bidouillable : Philips ne propose pas (encore) de SDK, mais en a clairement prévu les bases. Le pont peut ainsi être contrôlé par de simples requêtes HTTP, comme l’a montré Ross McKillop. Si le sujet vous intéresse, rendez-vous sur le forum non-officiel… et préparez-vous à perdre de nombreuses heures à vous amuser !
Cette ouverture du système Hue a permis l’éclosion d’un écosystème d’applications dépassant de très loin les possibilités offertes par l’app officielle et le portail web de Philips. Si vous n’avez pas votre iPhone ou votre iPad sous la main, c’est peut-être que vous êtes à votre Mac : Colors for Hue vous permet de contrôler vos ampoules depuis la barre de menus.
Sur iOS, Magic Hue permet d’utiliser votre installation Hue non comme un éclairage passif, mais comme un éclairage actif, notamment pour les occasions festives. Il est capable, entre autres choses, de faire évoluer les couleurs et l’intensité en fonction de la musique captée par votre iPhone.
Pratique ou pas ?
Bref, les ampoules Hue sont amusantes, très amusantes. Mais sont-elles vraiment pratiques ? Pas vraiment. Il manque d’abord un moyen plus facile de les allumer et de les éteindre : trouver son iPhone est souvent plus compliqué que de trouver l’interrupteur. Or si vous utilisez l’interrupteur, les ampoules ne sont plus alimentées : elles ne peuvent plus être pilotées.
Comme elles ne possèdent pas de mémoire, lorsque vous les rallumerez, elles auront perdu leurs réglages. Comme le pont ne communique avec les ampoules que si une app lui demande de le faire, il ne peut pas rétablir automatiquement les réglages précédents. Peut-être Philips ajoutera à sa gamme d’appareils ZigBee une sorte d’interrupteur ? Ce serait une excellente idée, mais en attendant, l’utilisation de ces ampoules est parfois frustrante.
Les différentes couleurs des ampoules Hue.
Les ampoules elles-mêmes ne sont pas toujours à la hauteur : les bleus et les rouges sont superbement saturés, le violet est étrangement hypnotique, mais les verts et les tons orangés sont souvent délavés. Lorsque l’on augmente l’intensité lumineuse, toutes les couleurs finissent par tirer vers le blanc, mais c’est là une limite de la technologie. Enfin, l’allumage prend environ deux secondes.
Malgré ces défauts, malgré le prix, malgré l’app officielle un peu bancale, on a pourtant du mal à en revenir : on prend par exemple très vite l’habitude de pouvoir régler l’intensité lumineuse d’une pièce, et surtout de programmer ce réglage pour se réveiller en douceur ou au contraire pour se préparer au sommeil. Le réglage de la couleur est presque un bonus.
Il existe néanmoins d’autres solutions, souvent bien moins chères, qui offrent des fonctions similaires. Les ampoules à LED dont on peut changer la couleur avec une télécommande sont légion, tout comme les lampes à variateur intégré. Mais aucune n’en fait autant et ne devient à ce point un objet que l’on prend plaisir à utiliser, surtout si l’on aime bidouiller.
Il est à la fois extrêmement difficile et très facile de recommander le kit de départ à 200 €. C’est tout le problème de ces ampoules, première génération d’un concept qui se démocratisera encore plus dans quelques années. Et deviendra alors indispensable.