« Le Cube a été un formidable échec, quasiment dès le premier jour » a raconté Tim Cook la semaine dernière lors d'une discussion à l'Université d'Oxford (vidéo intégrale, Cook débute à 30 min) où il a aussi évoqué l'un des traits de caractère de Steve Jobs.
Une étudiante l'interrogeait sur la gestion des échecs, comment distinguer le raté qui mérite néanmoins que l'on s'obstine de celui qui impose d'arrêter immédiatement les frais. Le Power Mac G4 Cube a appartenu à cette seconde catégorie. Lancé en juillet 2000, sa vente fut "gelée" un an plus tard. Une manière élégante de ne pas dire "arrêtée" tandis que Phil Schiller y allait aussi de sa pirouette sémantique « Les propriétaires de Cube adorent leur Cube, mais la plupart des clients ont décidé d'acheter plutôt notre puissante mini tour Power Mac G4 ».
« Des gens vous diront de ne jamais renoncer, qu'un échec n'est jamais définitif, c'est faux », a commencé par répondre Tim Cook « Vous devez comprendre lorsque quelque chose vous emmène droit dans le mur ».
Puis d'enchaîner sur l'un des quelques gros loupés d'Apple, celui du G4 Cube — vendu trop cher — et la manière dont Steve Jobs pouvait changer d'idée du tout au tout, sans faire de sentiments :
C'était un produit extrêmement important pour nous, auquel on était très attaché, il a représenté un énorme effort de développement, c'était une merveille d'ingénierie. Ça a été un formidable échec commercial, quasiment dès le premier jour
Il a fallu qu'on se regarde dans le miroir et qu'on admette qu'on s'était planté, et je crois qu'il est important de savoir se remettre en question sur quelque chose qui vous est cher.
Il rend alors hommage à Jobs qui, dit-il, avait cette capacité à « être passionné par quelque chose, à le promouvoir auprès de tout le monde mais à savoir se remettre en question en reconnaissant qu'il avait eu tort ».
Il répond à l'étudiante qu'il n'y a aucune méthode claire pour repérer ce qui relève de l'échec irréparable ou de l'erreur passagère.
Son conseil ? « Plus que toute chose, il faut faire preuve d'honnêteté intellectuelle, je vois beaucoup de gens qui n'arrivent pas à ravaler leur fierté et qui se trouvent dans l'incapacité d'accepter l'évidence que ça ne marche pas ». Parce qu'ils ont vendu leur idée à tout le monde, leurs amis, leurs proches : « Alors que l'échec est quelque chose de courant, on ne veut pas l'admettre mais c'est ainsi […] il faut avoir cette honnêteté et le courage de passer à autre chose ».
Steve Jobs, poursuit-il, était, de tous ceux qu'il a connus, le plus adroit dans cette gymnastique :
Il défendait une idée avec fougue et dans la minute ou les jours qui suivaient, si une nouvelle information était apparue, vous pouviez penser qu'il n'avait, absolument, jamais défendu cette idée précédemment.
C'était vraiment un pro pour ça et au début je me suis dit : waoh ! il est complètement inconstant. Et puis d'un coup j'ai su apprécier la beauté de la chose, parce qu'il ne restait pas bloqué sur quelque chose comme d'autres personnes, qui persistent sur une idée par amour-propre.
A propos du G4 Cube, on renvoie à un article publié il y a quatre ans. Cette machine a eu une courte existence mais ceux qui devaient la réparer en ont également gardé quelques souvenirs… (lire Chronique du SAV : le G4 Cube).