Travailler chez Apple, c’est presque aussi simple que de trouver une faille dans iOS. C’est l’aventure qui est arrivée à Alexandre Hélie, jeune hacker white hat canadien, qui a découvert trois failles dans le système d’exploitation d’Apple. « J’ai écrit un rapport, je l’ai envoyé à Apple », explique le jeune québécois à TVA Nouvelles, « et deux heures plus tard ils m’ont appelé, en panique, me disant : "Ne publie pas ça !" ».
Très au fait des pratiques dans le milieu, Alexandre s’attendait à recevoir une récompense en argent (une habitude chez Google, par exemple). « La majorité des grosses compagnies donnent de grosses sommes pour de telles trouvailles », indique-t-il, mais rien n’est venu… si ce n’est une invitation, reçue deux mois plus tard, pour visiter les locaux du constructeur à Cupertino.
Dans la foulée, il rencontre trois équipes pour des entretiens d’embauche… qui se concrétisent par deux offres d’emploi. À 21 ans, Alexandre va donc bûcher avec l’équipe en charge de tester la solidité et la fiabilité des OS avant leurs versions finales. La politique des visas étant assez complexe aux États-Unis, il devra tout d’abord travailler un an à Vancouver au sein de la branche canadienne d’Apple, avant de déménager à Cupertino.
Cette histoire est loin d’être unique en son genre. Tous les canaux sont bons pour recruter les talents, où qu’ils soient. Et Apple a de plus en plus de mal à faire rêver les ingénieurs, raconte The Guardian, qui s’appuie sur plusieurs témoignages de chasseurs de tête. James Knight, un développeur de 27 ans, n’y va pas par quatre chemins : « La culture [d’entreprise] chez Apple est si négative, si stricte, si dure ».
Il poursuit : « Chez Apple, vous allez travailler de 60 à 80 heures par semaine et un vice-président peut venir vous engueuler n’importe quand ? C’est un environnement de travail très hostile ». Knight a lâché son emploi chez Google pour concevoir des applications iOS. « En dehors du fait que nous allons devoir travailler [avec Apple] parce que nous concevons des apps pour leur App Store, je ne veux vraiment rien faire pour eux ».
Au-delà de ce cas particulier, les recruteurs dans la Silicon Valley déplorent qu’Apple n’attire plus les jeunes talents, ces derniers préférant travailler pour Facebook, Google (ou une des sociétés d’Alphabet), Uber ou Airbnb. La culture du secret (il est impossible de glisser sur son profil LinkedIn qu’on développe le futur iPhone) et la réputation de pingrerie d’Apple — où la nourriture est payante et qui n’offre pas de téléphones — ne plaide pas en faveur de l’entreprise. Quant au nouveau campus en forme de soucoupe volante, il est surnommé… l’Étoile de la Mort. Qui voudrait travailler pour Darth Vader ?
Autre problème plus embêtant encore, alors que les meilleurs ingénieurs veulent travailler sur les dernières technologies les plus en vogue, Apple joue la défensive (un autre problème lié à a culture du secret). « Le dernier lancement d’Apple [l’Apple Watch, NDLR] n’a pas été un gros hit », indique Michael Solomon, un chasseur de tête. « Et tout le monde a déjà un iPhone ». Apple se contenterait d’améliorer par petites touches ses produits (appareil photo de meilleure qualité, écran mieux défini), un challenge qui ne fait pas rêver les forts en thème.
Plus cruel encore, ce spécialiste du recrutement déclare : « Apple n’a pas de culture de l’ingénierie. Tim Cook fait un travail incroyable pour gérer l’entreprise, mais Steve Jobs était le gars que tout le monde voulait suivre dans la bataille ». On comprend alors mieux pourquoi les hackers qui se présentent spontanément à la porte du 1, Infinite Loop sont choyés.