Margrethe Vestager, la commissaire européenne à la Concurrence, a une solution pour résoudre le dossier des pratiques de l'App Store : qu'Apple autorise les boutiques alternatives sur iOS. La vice-présidente exécutive de la Commission européenne, interrogée par Kara Swisher pour son podcast du New York Times, s'exprimait sur le procès ayant opposé Epic Games au constructeur.
« Je pense qu'une partie de la plainte d'Epic pourrait être réglée en autorisant un deuxième App Store, parce que [l'éditeur de Fortnite] cherche des moyens différents de communiquer avec ses clients », indique la dirigeante européenne en ajoutant qu'elle et ses services avaient suivi le dossier « de très près, car il y a beaucoup de similarités » avec l'enquête sur l'App Store lancée par la Commission en juin 2020.
Si Margrethe Vestager entend les arguments d'Apple sur la sécurité et la confidentialité, elle estime que « ni la sécurité, ni la confidentialité ne devraient être utilisées comme une digue contre les concurrents ». Elle oppose également les différences de traitement entre éditeurs : « [Il y a] des applications gratuites qui ne paient donc aucune commission, d'autres apps que vous achetez sur lesquelles pèse une très forte commission qu'Apple ne paie pas elle-même pour ses propres apps ».
À l'origine, c'est une plainte de Spotify déposée devant la Commission qui a mis le feu aux poudres. Le service de streaming estime que la commission de 30% prélevée par Apple est trop élevée sur un marché où les marges sont faibles. Et c'est une commission à laquelle échappe Apple Music, bien sûr. Si Spotify est disponible sur l'App Store, il n'est pas possible de s'y abonner directement depuis l'application iOS et Spotify n'a pas le droit d'informer ses utilisateurs mobiles qu'ils doivent souscrire sur son site web.
Cette interdiction d'Apple rend les choses très difficiles, soulève la commissaire, « parce que si vous vous abonnez à Apple Music, il n'y a pas de commission. Même s'il est possible d'éviter la commission en souscrivant depuis le site web, l'utilisateur ne le sait pas » car les plateformes concurrentes ne peuvent rien dire. Pour Margrethe Vestager, cela constitue un cas de concurrence déloyale.
Margrethe Vestager n'a cependant pas eu beaucoup de chance avec Apple, le constructeur ayant remporté une bataille l'été dernier : la Cour de justice de l'Union européenne a annulé la décision de la Commission qui estimait que l'Irlande avait accordé une aide illégale de 13 milliards d'euros à l'entreprise. Les services de la commissaire à la Concurrence ont-ils eu la main trop lourde ?
« Bien sûr, je me pose beaucoup cette question. Je pense que c'est ce qu'il faut faire quand vous perdez en justice. Mais je crois que ce cas en lui-même a braqué un projecteur sur le problème ». Elle indique aussi que cette affaire pousse à un changement de législation afin d'obtenir de meilleurs résultats. Elle rappelle que la Cour de justice instruit l'appel de la Commission.
Concernant l'autre dossier chaud du moment, c'est à dire la taxation des multinationales, la commissaire se réjouit de la décision prise par le G7 Finances il y a quelques jours. Il va falloir maintenant convaincre tous les pays d'accepter cet accord, ce qui risque de poser un problème pour certains d'entre eux à la fiscalité très douce pour les entreprises, comme l'Irlande.
Margrethe Vestager estime cependant que les chances de succès sont « probablement meilleures » avec l'administration Biden qu'avec la précédente administration.