Récemment, Intel a annoncé la prochaine génération de puces Core, qui ne devrait pas s'appeler Core de 14e génération. Cette nouvelle architecture vise essentiellement le monde mobile et porte le nom de Meteor Lake.
Et cette nouvelle architecture reprend certains des choix d'Apple et généralise surtout la mise en place d'une architecture hybride, une solution arrivée tardivement chez Intel, à partir des Core de 12e génération (Alder Lake). Une des nouveautés vient de la structure elle-même : Intel emploie des « tuiles » (tile) pour construire ses puces. Mais la méthode d'Intel n'est pas la même que celle d'AMD, qui place plusieurs chiplets séparés sur le même composant, et se rapproche de ce qu'Apple fait avec les puces M1 et M2 Ultra.
Chez Apple, deux puces identiques sont reliées par un bus rapide, alors que chez Intel, un système sur puce est composé d'une tuile CPU (gravée en Intel 4, équivalent au 4 nm de TSMC), d'une tuile GPU (gravée en 5 nm par TSMC) et de deux autres tuiles (IO et Compute) pour gérer les autres tâches. La solution d'Intel porte le nom de Foveros et consiste à placer les tuiles sur une surface qui sert à l'interconnexion, ce qui permet de réduire l'espace entre les blocs.
La tuile CPU contient deux nouvelles architectures. D'un côté les cœurs P (pour Performance) qui passent à l'architecture Redwood Cove. Comme souvent, Intel annonce de meilleures performances et une meilleure efficacité, deux voies logiques. Il faut bien comprendre que les cœurs P d'Intel sont déjà probablement les plus rapides actuellement sur le marché, mais qu'ils ont une efficacité assez moyenne, tant face aux puces d'Apple que face à celles d'AMD. D'un autre côté, il y a les cœurs E, nom de code Crestmont. Plus économes, ils visent surtout à garder une bonne efficacité sur toutes les tâches simples et Intel indique encore une fois que la nouvelle architecture consomme moins et offre de meilleures performances.
La nouveauté est l'arrivée, dans une tuile gravée en 6 nm par TSMC, du chipset qui intègre — une première — des cœurs CPU. Intel place en effet des cœurs E dans une version « très basse consommation », avec une gravure pensée pour consommer moins (et probablement avoir des performances plus faibles). Cette tuile contient l'équivalent du chipset : Wi-Fi 7, USB, Thunderbolt 4, Ethernet, la gestion de la compression vidéo et des sorties du GPU, etc. Enfin, la tuile comprend aussi un composant devenu classique chez Apple : un NPU, c'est-à-dire une unité dédiée pour l'accélération des calculs liés aux réseaux neuronaux.
La tuile « GPU », elle, est donc gravée par TSMC en 5 nm. Elle reprend l'architecture des cartes graphiques Arc et contient 33 % d'unités en plus par rapport aux GPU intégrés dans les puces Intel précédentes (1 024 unités contre 768). Comme souvent, il ne faut pas s'attendre à des performances extrêmement élevées, et si vous avez un Mac Intel doté d'un GPU Intel, vous comprenez le problème. Le monde PC tend à proposer des solutions avec des performances moyennes dans les CPU, avec comme but principal de pouvoir effectuer les tâches classiques tout en permettant de jouer en 1080p avec des détails faibles. Alors qu'Apple tend à proposer des puces plus imposantes en augmentant le nombre d'unités du GPU, Intel se repose sur des GPU dédiés pour améliorer les performances, qu'ils viennent de Nvidia, AMD… ou Intel.
Une orientation (très) mobile
Pour le moment, Intel n'a pas encore annoncé les spécifications des différents Core 3, Core 5 ou Core 7, mais comme la sortie s'approche — a priori le 14 décembre 2023 —, elles devraient être dévoilées rapidement. Selon les premiers retours, Intel vise essentiellement le monde mobile avec Meteor Lake, comme avec les Core de 10e et 11e génération, qui différaient des puces de bureaux. Si Intel annonce des déclinaisons pour les PC desktop, c'est un peu biaisé : elles ne seraient déployées qu'en format BGA, c'est-à-dire avec une puce soudée sur la carte mère. Elles ne viseraient donc pas à remplacer les Core de 13e génération, qui s'enfichent dans un connecteur.
Sur le papier, Intel amène au moins une chose : de l'innovation. La conception en tuiles permet de passer outre les limites de la gravure d'Intel, tout en offrant un peu plus de modularité. De même, l'intégration de cœurs E « très basse consommation » en plus des cœurs classiques devrait permettre de réduire encore un peu plus la consommation dans un usage classique. Le seul point noir, pour le moment, vient de l'absence d'informations sur les performances réelles : des retours indiquent que les « nouveaux » cœurs P et E sont en réalité très proches des versions actuelles, ce qui amène questions. En effet, Intel garde la tête dans les benchmarks essentiellement parce que la fréquence de ses puces est élevée1 (6 GHz dans le meilleur des cas, un record) avec — en contrepartie — une consommation extrêmement élevée. Avec Meteor Lake, le résultat final risque donc de dépendre des performances de la gravure en Intel 4, et les déboires d'Intel ces dernières années n'incitent pas à espérer un gain particulièrement important.
Dans la pratique, les puces Meteor Lake devraient tout de même être un bon cru et Intel semble y croire, donc les fabricants devraient suivre et proposer de nombreux PC portables avec ces nouvelles puces. Mais reste à voir la réaction d'AMD… et un éventuel Apple M3 qui pourrait en pousser certains à switcher. Car, pour terminer, il faut bien comprendre une chose : Intel n'a plus l'aura ni la force d'il y a quelques années, et un échec comme pour les puces Broadwell (vues essentiellement dans les Mac…) ou même Cannon Lake (vues… nulle part ?) pourrait être lourd de conséquences.
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Pour se donner une idée, l'A17 Pro des iPhone 15 Pro offre des performances à peu près équivalentes aux meilleurs coeurs d'Intel avec environ 2 GHz de moins. ↩︎