Ca vous aura peut-être échappé, mais cette fois-ci, Apple est officiellement entrée en guerre frontale avec Nintendo et Sony. Terrain des opérations : les consoles de jeu portables. En effet, lors de la présentation des nouveaux iPod Touch, concernant la logithèque du petit frère de l'iPhone, Steve Jobs a mis l'accent en premier lieu sur les jeux. Depuis l'année dernière, Apple a résolument entamé sa révolution culturelle concernant le jeu (voir Apple et la fièvre du jeu). La dernière publicité pour le nouveau modèle n'en fait guère de secret : il s'agit de "l'iPod le plus amusant de tous les temps". Il ne s'agit donc plus vraiment d'un terminal à tout faire sur le plan des applicatifs, mais une console de poche qui rend accessoirement d'autres services.
La prophétie de Sega
Et de fait, outre les jeux historiques du Mac qui ont migré sur le petit prodige d'Apple, (Ambrosia, Freeverse, Pangea…) on retrouve, trahison suprême, de grands noms du monde videoludique japonais, qui jusqu'ici avaient soigneusement ignoré le Mac : Sega (Super Monkey Balls, Columns), Hudson Soft (Bomberman, Puzzloop), Konami (Frogger), Namco (Pacman, Ms Pacman), Sunsoft (Mahjong Solitaire). Mais également de grands éditeurs, comme Vivendi (Crash Bandicoot) et Electronic Arts (Spore, Need for Speed), ou encore THQ (de blob, Star Wars : the Force Unleashed). La prédiction du patron de Sega, qui voulait que tout le monde se mette à développer des jeux pour les appareils tactiles d'Apple, est en passe de se réaliser. Une chose est sûre, pour ce qui est de l'offre et de la demande, les choses sont nettement mieux engagées que la précédente tentative d'Apple d'affronter les consoles de jeu, avec feue la Pippin. Plus significatif encore, Apple a réussi là où Nokia a échoué avec la N-Gage, hybride de console portable et de téléphone mobile.
Se distinguer de l'iPhone
Il faut dire que l'iPod touch exige d'avoir un positionnement propre face à l'iPhone : d'un prix d'achat équivalent si l'on omet l'abonnement à l'opérateur téléphonique, l'iPod touch est avant tout un iPhone amputé de sa puce GSM/UMTS, de son appareil photo, et de son GPS. Les jeunes restent le cœur de cible des baladeurs d'Apple, et le jeu est donc un argument de poids face au reste de la gamme des iPods, histoire de justifier le tarif : l'iPod Touch sera donc dorénavant un iPod mâtiné d'une console de jeu. Bien que l'iPhone bénéficie de la même ludothèque, il est avantageux de positionner chaque produit dans son pré carré afin que l'un ne souffre pas de l'image de l'autre, d'autant qu'Apple a entamé le virage de l'entreprise pour l'iPhone.
Concernant l'iPod touch, Apple n'avait toutefois guère de choix : la Nintendo DS et la PSP ont toutes deux des capacités de lecteur MP3, voire de baladeur vidéo. Sony avait, dans un premier temps, tenté de créer un nouveau format vidéo pour la vente de films avec l'UMD, qui s'est vite avéré être un fiasco. La firme japonaise s'est donc rabattue sur les formats numériques intangibles (y compris de provenance douteuse), en supprimant le bridage de la résolution des vidéos MP4 stockées sur les Memory Sticks. La concurrence était donc déjà en marche : entre une console portable, qui cumulait jeux, musique, et vidéo, et un iPod dont les capacités de jeu étaient autrement plus limitées, le choix ne se faisait pas toujours en faveur de ces derniers. Pire encore, des rumeurs insistantes parlent d'un PSP Phone! Il fallait donc qu'Apple réagisse, la fameuse convergence battant à plein de tous les côtés de l'industrie du numérique.
Suivre l'exemple de Nintendo
Malgré l'absence totale de joystick, le pas était d'autant plus aisé à franchir que Nintendo avait déjà doublement défriché le terrain, voire essuyé les plâtres, avec la Wii et la DS : cette dernière propose, outre le joypad en croix (dont Nintendo détient d'ailleurs le brevet mondial exclusif) et les boutons, d'autres interfaces d'entrée, comme une entrée son, un écran tactile (tiens!), ou encore un accéléromètre (tiens tiens!).
L'intérêt stratégique pour Nintendo de proposer de nouvelles interfaces d'entrée avec ses deux consoles (nul n'ignore la spécificité de la fameuse wiimote) était double : d'une part se garantir un renouvellement du genre vidéoludique et des approches inédites et originales pour ses consoles. (Il faut dire que les éditeurs, au vu du montant colossal que représente la production d'un jeu, ont une fâcheuse tendance à se montrer conservateurs et à reprendre à l'envi une vieille recette qui a fait ses preuves, le seul terrain de progression étant la surenchère technologique. Certes, les nouveaux concepts de jeux qui foisonnent sur ces consoles laissent parfois dubitatif, mais voilà bien longtemps qu'on n'avait plus vu de nouveaux genres à part entière). D'autre part, disposer d'une ludothèque qui par nature se démarque de ses concurrents : jusqu'ici un jeu qui était porté sur toutes les consoles n'offrait guère de spécificité ou de différence flagrante.
C'était un inconvénient de taille pour les constructeurs : le débat ne portait plus vraiment sur la meilleure console, mais bien sûr la meilleure ludothèque, ce qui a entraîné une coûteuse guerre de contrats d'exclusivité pour s'arroger les services d'un éditeur de renom, si ce n'est de forcer les constructeurs à produire eux-mêmes des jeux audacieux, et une course pour la recherche et le développement afin d'être toujours à la pointe technologique. En décidant de jeter le gant ouvertement sur ce dernier plan, Nintendo a changé la donne, et la stratégie a payé puisque la Wii bat tous les records. Démonstration est faite : le public tient plus à s'amuser qu'à en avoir plein les mirettes.
Toujours est-il que l'absence de joypad sur iPod touch est un handicap dans le domaine du jeu : si l'avènement de la 3D a remis au premier plan les contrôles analogiques, il reste nombre de genres vidéoludiques qui exigent la précision qu'offre un joypad, et c'est autant de genres qui seront mal ou peu représentés sur iPod touch. On imagine mal un Tetris piloté à l'accéléromètre. Qu'à cela ne tienne, il reste encore l'écran multitouch, mais il s'agit là d'un pis-aller : les doigts masquent partiellement l'écran, et il n'y a pas de retour haptique du tap sur le bouton virtuel, aucune confirmation au toucher que vous avez bien appuyé sur un bouton, ce qui suscite chez le joueur un doute permanent sur la bonne interprétation qui est faite de ses gestes, et une frustration certaine lorsqu'elle se passe mal, en plein milieu d'un niveau ardu à franchir.
Les limites du multitouch
Cette absence de boutons se fait donc parfois cruellement sentir, à tel point que des fabricants de périphériques s'emploient à palier ce manque, avec un joypad qui vient se greffer sur l'iPhone et l'iPod touch. Le problème est d'ailleurs général, ne serait-ce que pour l'utilisation du clavier, et Apple semble vouloir y apporter une réponse selon certaines rumeurs (voir une interface à retour de force sur l'iPhone?), mais également à en croire un brevet plus prometteur encore qui donnerait du relief à un écran tactile. Mais si Apple veut donner un signe fort dans ce domaine, il lui en faudra probablement passer par l'adjonction d'un tel périphérique d'entrée sur la prochaine génération d'iPod touch. Après tout, le petit haut-parleur intégré récemment a pour première utilisation de pouvoir jouer sans les écouteurs, c'est plus pratique quand il s'agit de tourner l'appareil dans tous les sens sans se les arracher des oreilles.
La guerre ne fait que commencer, et chaque belligérant doit s'adapter à un marché en mutation permanente : les fabricants de consoles avaient pour habitude de ne sortir un nouveau modèle que quelques fois par décennies, alors que les téléphones mobiles ont un rythme bien plus soutenu. Ce qui pose également un problème du côté de la ludothèque, puisqu'il faut s'assurer une compatibilité ascendante, et éviter les erreurs d'achat en cas d'incompatibilité avec les modèles précédents. La distribution des logiciels ne se fera dorénavant plus que par le réseau. Il faut donc négocier des virages serrés et acquérir de nouvelles compétences pour maintenir sa compétitivité. Une chose est sûre, Apple va se frotter à de puissants adversaires avec son couple iPhone/iPod Touch. Reste à voir quels moyens elle est prête à s'octroyer pour percer dans ce nouveau domaine.
La prophétie de Sega
Et de fait, outre les jeux historiques du Mac qui ont migré sur le petit prodige d'Apple, (Ambrosia, Freeverse, Pangea…) on retrouve, trahison suprême, de grands noms du monde videoludique japonais, qui jusqu'ici avaient soigneusement ignoré le Mac : Sega (Super Monkey Balls, Columns), Hudson Soft (Bomberman, Puzzloop), Konami (Frogger), Namco (Pacman, Ms Pacman), Sunsoft (Mahjong Solitaire). Mais également de grands éditeurs, comme Vivendi (Crash Bandicoot) et Electronic Arts (Spore, Need for Speed), ou encore THQ (de blob, Star Wars : the Force Unleashed). La prédiction du patron de Sega, qui voulait que tout le monde se mette à développer des jeux pour les appareils tactiles d'Apple, est en passe de se réaliser. Une chose est sûre, pour ce qui est de l'offre et de la demande, les choses sont nettement mieux engagées que la précédente tentative d'Apple d'affronter les consoles de jeu, avec feue la Pippin. Plus significatif encore, Apple a réussi là où Nokia a échoué avec la N-Gage, hybride de console portable et de téléphone mobile.
Se distinguer de l'iPhone
Il faut dire que l'iPod touch exige d'avoir un positionnement propre face à l'iPhone : d'un prix d'achat équivalent si l'on omet l'abonnement à l'opérateur téléphonique, l'iPod touch est avant tout un iPhone amputé de sa puce GSM/UMTS, de son appareil photo, et de son GPS. Les jeunes restent le cœur de cible des baladeurs d'Apple, et le jeu est donc un argument de poids face au reste de la gamme des iPods, histoire de justifier le tarif : l'iPod Touch sera donc dorénavant un iPod mâtiné d'une console de jeu. Bien que l'iPhone bénéficie de la même ludothèque, il est avantageux de positionner chaque produit dans son pré carré afin que l'un ne souffre pas de l'image de l'autre, d'autant qu'Apple a entamé le virage de l'entreprise pour l'iPhone.
Concernant l'iPod touch, Apple n'avait toutefois guère de choix : la Nintendo DS et la PSP ont toutes deux des capacités de lecteur MP3, voire de baladeur vidéo. Sony avait, dans un premier temps, tenté de créer un nouveau format vidéo pour la vente de films avec l'UMD, qui s'est vite avéré être un fiasco. La firme japonaise s'est donc rabattue sur les formats numériques intangibles (y compris de provenance douteuse), en supprimant le bridage de la résolution des vidéos MP4 stockées sur les Memory Sticks. La concurrence était donc déjà en marche : entre une console portable, qui cumulait jeux, musique, et vidéo, et un iPod dont les capacités de jeu étaient autrement plus limitées, le choix ne se faisait pas toujours en faveur de ces derniers. Pire encore, des rumeurs insistantes parlent d'un PSP Phone! Il fallait donc qu'Apple réagisse, la fameuse convergence battant à plein de tous les côtés de l'industrie du numérique.
Suivre l'exemple de Nintendo
Malgré l'absence totale de joystick, le pas était d'autant plus aisé à franchir que Nintendo avait déjà doublement défriché le terrain, voire essuyé les plâtres, avec la Wii et la DS : cette dernière propose, outre le joypad en croix (dont Nintendo détient d'ailleurs le brevet mondial exclusif) et les boutons, d'autres interfaces d'entrée, comme une entrée son, un écran tactile (tiens!), ou encore un accéléromètre (tiens tiens!).
L'intérêt stratégique pour Nintendo de proposer de nouvelles interfaces d'entrée avec ses deux consoles (nul n'ignore la spécificité de la fameuse wiimote) était double : d'une part se garantir un renouvellement du genre vidéoludique et des approches inédites et originales pour ses consoles. (Il faut dire que les éditeurs, au vu du montant colossal que représente la production d'un jeu, ont une fâcheuse tendance à se montrer conservateurs et à reprendre à l'envi une vieille recette qui a fait ses preuves, le seul terrain de progression étant la surenchère technologique. Certes, les nouveaux concepts de jeux qui foisonnent sur ces consoles laissent parfois dubitatif, mais voilà bien longtemps qu'on n'avait plus vu de nouveaux genres à part entière). D'autre part, disposer d'une ludothèque qui par nature se démarque de ses concurrents : jusqu'ici un jeu qui était porté sur toutes les consoles n'offrait guère de spécificité ou de différence flagrante.
C'était un inconvénient de taille pour les constructeurs : le débat ne portait plus vraiment sur la meilleure console, mais bien sûr la meilleure ludothèque, ce qui a entraîné une coûteuse guerre de contrats d'exclusivité pour s'arroger les services d'un éditeur de renom, si ce n'est de forcer les constructeurs à produire eux-mêmes des jeux audacieux, et une course pour la recherche et le développement afin d'être toujours à la pointe technologique. En décidant de jeter le gant ouvertement sur ce dernier plan, Nintendo a changé la donne, et la stratégie a payé puisque la Wii bat tous les records. Démonstration est faite : le public tient plus à s'amuser qu'à en avoir plein les mirettes.
Toujours est-il que l'absence de joypad sur iPod touch est un handicap dans le domaine du jeu : si l'avènement de la 3D a remis au premier plan les contrôles analogiques, il reste nombre de genres vidéoludiques qui exigent la précision qu'offre un joypad, et c'est autant de genres qui seront mal ou peu représentés sur iPod touch. On imagine mal un Tetris piloté à l'accéléromètre. Qu'à cela ne tienne, il reste encore l'écran multitouch, mais il s'agit là d'un pis-aller : les doigts masquent partiellement l'écran, et il n'y a pas de retour haptique du tap sur le bouton virtuel, aucune confirmation au toucher que vous avez bien appuyé sur un bouton, ce qui suscite chez le joueur un doute permanent sur la bonne interprétation qui est faite de ses gestes, et une frustration certaine lorsqu'elle se passe mal, en plein milieu d'un niveau ardu à franchir.
Les limites du multitouch
Cette absence de boutons se fait donc parfois cruellement sentir, à tel point que des fabricants de périphériques s'emploient à palier ce manque, avec un joypad qui vient se greffer sur l'iPhone et l'iPod touch. Le problème est d'ailleurs général, ne serait-ce que pour l'utilisation du clavier, et Apple semble vouloir y apporter une réponse selon certaines rumeurs (voir une interface à retour de force sur l'iPhone?), mais également à en croire un brevet plus prometteur encore qui donnerait du relief à un écran tactile. Mais si Apple veut donner un signe fort dans ce domaine, il lui en faudra probablement passer par l'adjonction d'un tel périphérique d'entrée sur la prochaine génération d'iPod touch. Après tout, le petit haut-parleur intégré récemment a pour première utilisation de pouvoir jouer sans les écouteurs, c'est plus pratique quand il s'agit de tourner l'appareil dans tous les sens sans se les arracher des oreilles.
La guerre ne fait que commencer, et chaque belligérant doit s'adapter à un marché en mutation permanente : les fabricants de consoles avaient pour habitude de ne sortir un nouveau modèle que quelques fois par décennies, alors que les téléphones mobiles ont un rythme bien plus soutenu. Ce qui pose également un problème du côté de la ludothèque, puisqu'il faut s'assurer une compatibilité ascendante, et éviter les erreurs d'achat en cas d'incompatibilité avec les modèles précédents. La distribution des logiciels ne se fera dorénavant plus que par le réseau. Il faut donc négocier des virages serrés et acquérir de nouvelles compétences pour maintenir sa compétitivité. Une chose est sûre, Apple va se frotter à de puissants adversaires avec son couple iPhone/iPod Touch. Reste à voir quels moyens elle est prête à s'octroyer pour percer dans ce nouveau domaine.