Chaque année, c’est la même rengaine, les membres de la CIPA ont vendu moins d’appareils photo que l’année précédente. L’association essentiellement formée de fabricants japonais se félicite pourtant d’avoir vendu « seulement » 8,01 millions d’appareils en 2022, douze fois moins qu’il y a dix ans, quand l’industrie n’avait pas encore réalisé qu’elle était au bord du précipice. De fait, l’année 2022 n’a pas été si mauvaise que cela.
D’abord parce que les ventes ont dépassé les (maigres) espérances. Échaudés par les pénuries de semi-conducteurs, les fabricants ne pensaient pas pouvoir vendre plus de 7,85 millions d’appareils en 2022. Après un début d’année très difficile, les ventes ont augmenté régulièrement pour dépasser les niveaux de 2021, avant de s’effondrer… avant les fêtes. Le marché n’est clairement plus gouverné par le grand public.
Ensuite parce que les ventes d’appareils « hybrides » à objectifs interchangeables (mirrorless) rebondissent. Il n’a manqué que 65 000 unités pour dépasser le record historique de 4,14 millions d’appareils écoulés en 2018, mais dans l’intervalle, le panier moyen a presque doublé, et dépasse maintenant 900 €. Jamais un appareil à objectifs interchangeables n’avait couté aussi cher en vingt ans.
Ce n’est pas encore suffisant pour compenser la disparition annoncée des boitiers reflex, dont les ventes ont été divisées par huit en dix ans, et sont tombées sous la barre des 2 millions d’unités au-dessus de laquelle les compacts s’accrochent. Qui l’eût cru ? Le marché s’effondre par ses deux bouts : le prix moyen des compacts s’envole certes à 240 €, sous l’effet du succès des compacts « experts », mais celui des reflex atteint péniblement 330 €.
Les appareils mirrorless représentent le seul horizon d’une industrie broyée par le smartphone. Qui dit appareil à objectifs interchangeables dit objectifs, et les fabricants vendent 1,6 objectif pour chaque boitier écoulé. Les formules optiques sont toujours plus complexes, les matériaux toujours plus raffinés… et les prix toujours plus élevés. On peut maintenant parler de marché de niche.