Le patient est mal en point, mais l’hémorragie est endiguée, ainsi pourrait-on décrire le marché des appareils photo. Sa progression est modeste, de 4,24 milliards d’euros en 2022 à 4,45 milliards d’euros en 2023 (+ 5 %), mais c’est la première depuis 2017. Les membres de la CIPA peuvent pousser un soupir de soulagement : la transition des photographes professionnels vers les boitiers mirrorless compense enfin la disparition presque totale du marché grand public.
À l’exception notable de Ricoh, tous les membres de la CIPA proposent désormais des boitiers mirrorless à grand capteur. Canon et Nikon rattrapent le temps perdu en étendant leur gamme dans les deux directions, avec des modèles aussi abordables que le R100 et le Z30 ou aussi perfectionnés que le R5 et le Z8, tandis qu’OM System se refait un nom avec son OM-1 Mark II. Sony diversifie son offre professionnelle avec des modèles de plus en plus spécialisés, au moment où Fujifilm et Hasseblad font renaitre le moyen format.
Sans surprise, les ventes de boitiers mirrorless atteignent le niveau record de 4,8 millions d’unités, mais pour la première fois, le panier moyen perd quelques euros pour tomber à 748 €. Les ventes de reflex, divisées par onze en dix ans, chutent à 1,2 million d’exemplaires, mais le panier moyen remonte légèrement à 302 €. Ces deux mouvements compensent la descente aux enfers des compacts, qui passent sous la barre des 2 millions d’unités avec un panier moyen qui s’envole à 279 €, preuve de la disparition presque totale du marché grand public.
C’est un mal pour un bien : les fabricants n’ont jamais vendu si peu d’appareils, mais ne les ont jamais vendus aussi cher. Surtout, les reflex comme les mirrorless doivent être complétés par des objectifs, 1,6 exemplaire en moyenne pour chaque boitier vendu. Les formules optiques sont toujours plus complexes, les matériaux toujours plus raffinés… et les prix toujours plus élevés. Dans l’absolu, le marché des appareils est trois fois plus petit qu’il ne l’était à son sommet en 2010, mais dans les faits, il pourrait bien s’avérer trois fois plus lucratif.